En l’honneur de son nouveau spectacle, le Puy du Fou a lancé une chasse au trésor, à la recherche de l’un des artefacts les plus légendaires : Exkalibur, l’épée du Roi Arthur.

D’une valeur de 250 000 euros, l’arme a été forgée, recouverte d’or et sertie d’une pierre précieuse par les ‘meilleurs forgerons et joailliers de France’.
L’épée pèse 3,4 kilos, mesure 124 cm. Les différentes gravures celtiques que l’on peut trouver sur la lame ou sur les différents éléments de la poignée et du fourreau sont exécutées à la main, sur la base du travail graphique de Sonia Chiapuso.
Les techniques utilisées pour sa création sont d’époque (notamment l’emploi d’une forge à charbon de bois) et le bijou sur son pommeau est une spinelle rouge de 6,23 carats, sourcée directement dans les mines de Luc Yen, au Vietnam, par la maison Bonnot Paris.
Les aventuriers qui tenteront leur chance devront résoudre 12 énigmes calligraphiées et déchiffrer 12 enluminures qui les mèneront à l’épée enchantée.
Pour ce faire, ils pourront compter sur 6 coffrets contenant chacun le jeu Exkalibur en version Digitale et Physique, ainsi que divers agréments en fonctions du prix de la formule.

Si le coffret le plus rudimentaire à 39 € contient uniquement le jeu, le coffret le plus fourni à 129 € contient également :
1. Le carnet de l’aventurier – un carnet texturé qui vous accompagnera tout le long de l’aventure.
2. Un Sceau et de la Cire pour des missives au cachet élégant.
3. Un Coffret Calligraphie contenant une plume et son support, ainsi qu’une fiole d’encre noire.
4. Amelia Davies et la Quête du Graal – Un jeu d’enquête historique durant 10 à 12 heures qui vous plonge dans une quête immersive pour le Graal.
5. Gradalis – Un jeu de stratégie et d’ambiance à faire en famille pour essayer de trouver le trésor en évitant les pièges et les malédictions sur votre chemin.

Depuis quatre jours, ceux qui se sont inscris au jeu peuvent donc s’armer de courage, de patience ainsi que d’une carte grandeur nature de l’Europe Médiévale pour retrouver Exkalibur, enterrée quelque part en Europe.
De la quête de la chouette d’or au vol de l’épée de Durendal en juin 2024 à Rocamadour en passant par l’attrait pour les Escape Games ; pourquoi sommes nous si friands de chasse au trésors, d’énigmes et d’artefacts magiques ?

Un art fossile
D’abord, le cherchant obéit à un instinct qui lui vient de l’aube des temps, celui du chasseur cueilleur. Dès – 100 000 ans, cet aventurier préhistorique défie la rigueur environnementale et enclenche le processus civilisationnel.
Le Puy du Fou ne l’a pas oublié, les 12 énigmes et leurs enluminures étant inscrites sur peau de bête, nous ramenant aux temps où les hommes chassait la grande faune et où les femmes décodaient le Grand Livre de la Nature.

Une quête profane ?
La présence du triskèle sur la garde et d’une croix nimbée sur la lame évoque la dimension sacrée et rituelle de l’épée.
Depuis le XXe siècle, il est en effet de bon ton d’établir un lien entre le cycle Arthurien et la Mythologie celtique.

Cependant, le Totémisme véritable repose sur la sacralisation de l’objet, de l’animal ou du phénomène naturel ; interdisant sa fabrication, sa recherche ou même sa contemplation.
À ce titre, on peut se demander si cette nouvelle Exkalibur constitue une rupture implicite avec un ordre ancien.
En cherchant activement à s’emparer de ce qui ne peut être que murmuré et fantasmé, la quête d’Exkalibur traduit la victoire du profane sur le religieux, du minéral raffiné mais trompeur sur la roche brute et authentique.

Entre histoire et légende
On a parfois tendance à l’oublier mais l’existence du Roi Arthur n’est pas historiquement attestée. Le cycle Arthurien constitue la partie la plus connue de la Matière de Bretagne et repose essentiellement sur un ensemble de poèmes, de récits et de textes composés en langue galloise, faisant mention d’un seigneur Breton qui aurait organisé la défense des îles britanniques et de la Bretagne armoricaine face aux envahisseurs germains au Ve siècle et au début du VIe siècle.

Le Roi Arthur n’est donc pas une figure issue du moyen âge central, même si sa popularité en France a été portée par des écrivains de cette période, notamment Chrétien de Troyes à qui on doit la toute première mention de l’épée du Roi Arthur sous le nom d’Excalibur.

Ce conte folklorique est cependant ancré dans la réalité en ce sens qu’il décrit la romanisation et la christianisation de la Grande Bretagne et de la Bretagne continentale.
Enfin, la recherche de l’objet magique se situe à la jonction de trois sciences encore répandues de nos jours : l’héraldique (ou l’étude des blasons), la vexillologie (ou l’étude des drapeaux) et la numismatique (l’étude de la monnaie, qui n’est autre que la corrélation du drapeau et du blason).

Une relique intermédiaire
La relique ultime, symbolisant la quête de l’absolu, est bien entendu celle du Graal. La recherche d’Exkalibur pourrait donc représenter une étape dans un cheminement beaucoup plus vaste. Que faire une fois l’épée retrouvée ? La démonter et la fondre pour en récupérer les métaux précieux ? La vendre au enchères ou l’offrir à un musée ? Bien souvent, une quête peut en cacher une autre…

Les deux épées
Dans le folklore d’origine, une distinction est clairement faite entre l’épée enfichée dans le rocher et l’épée du Lac.
Arthur, alors simple écuyer, devient roi en retirant l’épée du rocher, sous l’autorité de Merlin et après l’échec de tous les autres prétendants au trône.
La Dame du Lac – fée dont le magicien Merlin est épris – demande alors aux elfes de forger une nouvelle épée. Excalibur fut fabriquée dans un métal indestructible, et son son fourreau avait la capacité de protéger le porteur de l’épée.

Le vol de l’âme
Exkalibur n’est pas Excalibur. Car la quête de l’enrichissement ne saurait remplacer le cheminement spirituel.
Cela nous est suggéré dans le nom même de cette nouvelle épée. Le ‘k’ signalant une rupture, une cassure avec l’ordre ancien. L’objet de la quête prévaut sur la quête elle – même, et la magie laisse place à l’enchantement.
Sans oublier que les maîtres quêteurs qui nous lancent sur les chemins exploitent une faille dans la psychologie humaine ; l’oscillation perpétuelle entre libido objectale et libido narcissique ; posséder (par la main) et être possédé (par le regard).

On est toutefois séduit par la force évocatrice de cette aventure. Et on salue le fait qu’à l’heure des rétributions automatiques et des satisfactions instantanées, le Puy du Fou propose une chevauchée qui s’inscrit dans la durée, la chasse pouvant s’étendre jusqu’à 5 ans.
Dans la légende arthurienne, c’est la Dame du Lac qui remet finalement l’épée au jeune roi : s’il est dit qu’Exkalibur est enterrée, on peut néanmoins supposer qu’elle se situe non loin d’un point d’eau.
